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Escapade à Berlin

17 mars 2019

Une escapade à Berlin, c'est avant tout une plongée dans l'histoire. Chaque partie de la ville est le témoignage d'un événement qui dépasse largement le lieu lui-même.

Le séjour est très peu adapté aux enfants en bas âge. L'histoire de la ville et surtout de son “mur” fait qu'il n'y a pas UN centre “mignonet” à taille humaine. Il y a deux centres, comme il y avait un Berlin Est et un Berlin Ouest.

Les distances sont grandes entre les différents points d'intérêt.

L'architecture est intéressante d'un point de vue historique, la ville ayant été largement détruite à la fin de la Seconde Guerre. On a un grand panel des constructions de l'après-guerre.

Cependant, cela peut-être un peu lassant d'arpenter d'immenses avenues dont les bâtiments donnent un air de banlieue.

Les transports en commun sont souvent les bienvenus, pour ne pas manquer les incontournables.

Berlin est surtout riche de musées sur son histoire

Petite balade...

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Brandenbourger Tor

 

Construite entre 1788 et 1791, dans le style néoclassique, cette porte est un symbole de la ville. Ce monument faisait partie intégrante du mur de Berlin.

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Le Reichstag

Sa construction a débuté en 1884, financée par l'argent versé par la France au titre d'indemnité de guerre après 1871.

Dès 1894, le bâtiment abrite l'Assemblée du Reich, jusqu'à son incendie le 27 février 1933.

Aujourd'hui surmonté d'une très belle coupole en verre, il abrite le Bundestag depuis 1999.

De là, on a une très belle vue sur Großer Tiergarten, un parc de 210 hectares créé au 16e siècle qui a gardé son aspect sauvage.

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Kurfürstendamm

Appeler aussi Ku'damm (c'est plus court)

 

Cette avenue fait 3,5 km. Au 16e siècle, c'était un chemin de rondins, au 19e siècle c'est une rue élégante de résidences, commerces et divertissements.

Dès 1933, l'avenue est le théâtre d'attaques antisémites.

Durant la guerre froide, le Ku'damm devient la vitrine commerciale de Berlin-Ouest : magasins de luxe, cafés, cinémas, s'allignent sur tout le le long.

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Alexanderplatz

 

Cette place existe depuis le 17e siècle.

Alors place du marché, elle fait aujourd'hui 80 000 mètres carrés.

Durant les décennies du mur, elle était la vitrine de l'Est, une grande capacité d'accueil pour les manifestations qui célèbrent le communisme.

 

Sur la place, depuis 1969, on trouve la “Fontaine de l'amitié des peuples” de Walter Womacka et là très célèbre horloge Universelle Urania de Erich John.

Il y a également une très belle vue sur la tour de la télé, l'édifice le plus haut d'Allemagne, construit en 1969.

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Nicolaïviertel

 

C'est le centre de la plus ancienne zone habitée du “vieux Berlin”.

Intégralement détruit durant la guerre, il a été reconstruit pierre par pierre à l'occasion du 750e anniversaire de la ville.

L'endroit est très agréable mais ceux qui s'attendent au charme des vieux quartiers que l'on trouve ailleurs en Europe, risquent d'être un peu déçu.

En repartant, il faut passer par Museuminsel, l'île qui regroupe cinq musées.

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Bebelplatz

 

On y trouve l'Opéra d'État, une université, la cathédrale Saint-Edwige (la plus ancienne église catholique de Berlin) mais surtout face à l'ancienne bibliothèque, un mémorial de l'Autodafé.

Une simple plaque de verre au sol, de 1 mètre carrés environ, à travers laquelle on voit une bibliothèque aux rayons vides. C'est sur ce site, que le 10 mai 1933, les membres de la SA et des groupes de jeunes nazis ont brûlé 20 000 livres “non allemands”.

Ce mémorial “la Bibliothèque engloutie” est l'oeuvre de Micha Ullman, né à Tel-Aviv en 1939, et membre de l'Académie des Beaux-Arts de Berlin.

Des musées...

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Topographie de la terreur

Niederkirchnerstraße 8

Entrée gratuite

 

Un lieu chargé d'histoire, on est entre le musée pédagogique et le mémorial de la souffrance.

L'extérieur est austère, et pour cause, on se trouve sur l'emplacement de l'ancien centre nazi de la répression. Les bâtiments abritant les quartiers généraux de la Gestapo et des SS ont été détruits à la fin de la Seconde Guerre mondiale et les ruines rasées après la guerre.

Aujourd'hui, le bâtiment, sombre et cubique, trône au milieu d'un environnement de ballast ferroviaire. C'est assez glaçant mais ce n'est rien, comparé à ce qu'on trouve à l'intérieur !

 

L'exposition est très bien agencée, à la fois chronologique et thématique.

De nombreux documents d'archives (surtout des photographies) retracent la montée du nazisme, la mise en place de la terreur, les persécutions...

La Fondation “Topographie de la terreur” s'est donnée pour mission de “diffuser des informations sur le régime de terreur mis en place par les nazis et inviter le public à réfléchir sur ce chapitre d'histoire et ses conséquences après 1945”.

 

À l'accueil, un film d'une dizaine de minutes sert d'introduction à la visite. Sur demande il peut être diffusé en français.

Mieux vaut en profiter car ensuite tout est en allemand et en anglais.

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Mémorial aux Juifs assassinés d'Europe

Cora-Berliner-straße

Entrée gratuite

 

Un lieu où l'émotion est palpable. Situé au centre de Berlin, entre la porte de Brandebourg et la Postdamer Platz, ce “monument” perpétue le souvenir des victimes juives exterminées par les nazis.

On reste muet face au 19073 m2 couverts de 2711 stèles de béton, de tailles variées, disposées en maillage formant une immense vague.

 

Cette installation évoque sans conteste, la peur, la solitude, la traque...

En dessous se trouve le centre d'information. Mieux vaut prendre l'audio guide, les documents sont un peu petits eut égard à la fréquentation élevée du lieu.

On chemine à travers des salles toutes plus bouleversantes les unes que les autres : la politique de la terreur, l'histoire du génocide, des extraits de journaux intimes, des lettres, redonnent voix à ceux qui ont péri.

Dans une salle, 15 familles dont on nous retrace la vie, illustrent les différents milieux de vie des populations juives touchées par les persécutions dans toute l'Europe.

On est à la fois, dans l'Histoire et dans l'intime, c'est ce qui donne au lieu un caractère très particulier.

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Mauer Museum

Checkpoint Charlie

Friedrichstraße 43-45

 

 

Créé dans une habitation privée, ce musée à ouvert ses portes en 1962.

Il est vrai, qu'aujourd'hui, il paraît vieillot, c'est très fouilli, très chargé et les textes sont souvent très longs.

Cela dit, il me semble que c'est également cela qui fait son charme.

Le lieu n'est pas lisse et aseptisé comme beaucoup de musées dernier cri.

Certes, les murs sont couverts de panneaux de textes mais tout est traduit en anglais, français et russe.

On peut, bien sûr, prendre un audioguide mais on peut aussi procéder “à l'ancienne” et faire l'effort de lire.

Il y a beaucoup de photos et d'objets. Le musée ne se contente pas de raconter l'histoire du mur, il expose aussi le combat pour la liberté.

On trouve les moyens de fuite les plus originaux : par montgolfière, par télésiège ou encore par des mini sous-marins. Il est indéniable que la fuite rend inventif !

 

La situation géographique du musée se veut emblématique. Des fenêtres du bâtiment, on a une vue sur le Checkpoint Charlie là où la scission des mondes a commencé mais également où elle a pris fin.

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Mémorial du mur de Berlin

Bernauer Straße 111

gratuit

 

Inauguré en 1998, c'est le seul endroit où l'on peut encore voir l'intégralité du dispositif frontalier de la RDA.

Le mémorial s'étend sur 1,4 km le long de l'ancienne bande frontalière entre Est et Ouest.

Au début du parcours, on trouve Nordbahnhof qui était l'une des stations fantômes durant la présence du mur.

Le cheminement se fait en extérieur avant d'arriver au centre de documentation où une exposition permanente présente le contexte historique et politique de la division de la ville jusqu'à la réunification.

Au dernier étage, une terrasse nous place dans la position d'un berlinois de l'Ouest : une vue sur le mur, sur la large bande de sécurité, une tour de guet juste en face.

 

L'ensemble du Mémorial se veut un site commémoratif de deuil individuel et de mémoire collective, de transmission de l'histoire et de réflexion.

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East Side Gallery

Le long de la Mühlenstraße

 

 

Une chouette balade entre histoire et art. 1,3 km de reste du mur sert de support au street art.

On peut y voir 118 peintures d'artistes de 21 pays.

Une très belle galerie gratuite et en plein air.

Le premier “tableau” a été effectuée par Christine Mac Lean en décembre 1989, immédiatement après la chute du mur.

Beaucoup d'oeuvres évoquent le mur et sa chute.

L'ensemble des fresques est porteuse d'un message pacifique et fait référence inévitablement à la liberté.

Parmi les œuvres les plus connues, il ne faut absolument pas manquer “le baiser de l'amitié” entre Erich Honecker et Leonid Brejnev, réalisé par Dmitri Vrubel.

 

En 2009, à l'occasion du 20e anniversaire de la chute du mur, les artistes sont revenus restaurer leurs œuvres qui avaient subi de nombreux endommagements entre l'érosion et le vandalisme.

Cette promenade est à ne pas manquer !

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Le musée de l'espionnage

Leipziger Platz 9

 

À ne pas manquer avec des enfants ou des ados.

L'endroit est très bien fait et très ludique.

C'est à la fois un musée sur l'histoire de l'espionnage et une plongée dans l'univers trouble de ceux qui le composent.

Des premiers messages codés de Jules César à Enigma, des vrais espions telle Mata Hari à ceux de la littérature et des films, tout est décortiqué, sans jamais être ennuyeux.

 

La présentation des multiples gadgets est assez drôle : du soutien-gorge équipé d'un micro en passant par le bâton de rouge à lèvres qui est en fait un mini pistolet... tout ça est d'une inventivité assez extraordinaire.

 

Votre ado s'amusera à chercher d'éventuels micros cachés dans une pièce où tentera plusieurs fois de traverser un couloir zèbré de rayons laser.

 

À coup sûr, vous ressortirez de là avec le futur James Bond !

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Hamburger Bahnhof

Invalidenstraße 50-51

Musée d'art contemporain

Il est IMPÉRATIF de se renseigner avant la visite, surtout si vous avez motivé vos compagnons de route en leur promettant des tableaux de Andy Warhol, Liechtenstein, Keith Haring, Jean-Michel Basquiat...

Eh oui ! Ici on est capable de déloger ces grands noms du fond permanent pour présenter des installations vidéo.

Par la même occasion, cela plonge dans le noir la plus belle salle du musée, une immense galerie aux voûtes métalliques et verrière !

Le bâtiment qui abrite depuis 1996 le musée, est une ancienne gare construite en 1847. Elle reliait Berlin à Hambourg.

Son architecture de gare a été conservée, ce qui donne un énorme charme au lieu.

 

En ce moment, seuls les mordus d'art très, très contemporain y trouveront leur compte.

Les membres de ”Pourvu Qu'on Ait Livre's” n'ont toujours pas percé le mystère de l'art vidéo, ils sont donc mal placés pour commenter cette étrange exposition.

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Museum für Film und Fersehen

Potsdamer straße

 

Les cinéphiles accros aux films allemands, des années 1900 à nos jours, seront comblés, les autres passeront un moment agréable dans un beau lieu.

La scénographie est très belle, à la fois très soignée et ludique.

Dommage qu'il n'y ait pas de plaquette en français !

 

Le parcours de la visite est plutôt original, on passe sur un chemin lumineux au milieu des miroirs, on découvre les premiers effets spéciaux, les premiers projecteurs, les premières affiches...

Une large place est faite à Métropolis (1927, Fritz Lang) avec des dessins, des photos du tournage, une ambiance...

Une très belle salle circulaire rend un hommage appuyé à Marlène Dietrich peut-être pour mettre définitivement un terme aux rapports difficiles qu'elle a entretenu avec l'Allemagne.

 

Le cinéma d'aujourd'hui n'est que survolé mais il est vrai que dans le 7e art, il faut souvent un peu de recul pour la qualification de “chef-d'œuvre” ou de “monstre du cinéma”.

Pour se restaurer...

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Agustiner am Gendarmenmarkt

Charlottenstraße 55

 

Une bonne brasserie bavaroise en plein Berlin.

Comme souvent, c'est un grand établissement assez bruyant mais chaleureux malgré la gigantesque salle.

Le choix n'est pas très large, mais les assiettes sont bien garnies c'est savoureux et les prix légers.

Les plats de saucisses (largement déclinés dans cette ville) tournent autour des 10 €.

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Maximilians

Speisen wie in Bayern

Friedrichstraße 185-190

 

Encore (et toujours) une grande salle mais l'ambiance générale n'est pas désagréable, si ce n'est l'accueil qui n'est pas toujours très souriant. Peut-être parce que les serveurs et serveuses sont obligés de porter le costume folklorique de la Bavière !?

En tous les cas, les plats sont très bons et très copieux, peut-être même trop, car il ne reste pas beaucoup de place pour un dessert !

Le midi : plats à moins de 10 €

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Max und Moritz

Orianenstraße 162

 

Situé au cœur de Kreutzberg, l'établissement existe depuis 1902. Devenu cantine d'ouvriers à l'époque du mur, c'est aujourd'hui un resto typique.

Une grande salle décorée de céramiques anciennes, des grosses tables en bois pour déguster d'authentiques recettes berlinoises pour 10 € environ.

Deux librairies...

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Zadig

Linienstraße 141

 

Une très belle librairie française, “étiquetée” comme “librairie francophone de référence” par le Centre national du livre. Cette librairie a ouvert ses portes en 2003. Son ambition est de proposer un large éventail d'ouvrages mais aussi de porter un intérêt tout particulier pour les thématiques franco-allemandes.

Le choix est vaste, le rayon enfant/littérature de jeunesse, très beau, l'accueil sympathique...

Une ambiance idéale pour se laisser tenter par un ou plusieurs livres.

 

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Französische Buchhandlung

au niveau - 1 des Galeries Lafayette

Jögerstaße 61

 

 

Cette belle Librairie, petite mais bien fournie et bien décorée, se trouve au niveau - 1 des Galeries Lafayette, autant dire qu'on traverse un petit bout de France pour y accéder.

Le bâtiment a été créé par Jean Nouvel autour d'un atrium, doté d'une sorte de double cône lumineux de verre, à la manière d'un sablier.

Dans la librairie, outre un large choix des dernières publications, une belle table propose les incontournables de la littérature allemande. Excellente idée pour les touristes de passage.

Cinq livres...

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Les Tilleuls de Berlin de Jean Octeau, Le Livre de Poche, 2017

 

“À 30 ans, Karl Schuster, originaire de Transylvanie a déjà conquis le milieu de l'art à Berlin et sillone l'Europe. D'abord ébloui par Sarah, il découvre ensuite la passion avec Esther jusqu'à l'inévitable séparation.

Avec Janina, l'amour renaît sous une autre forme et c'est elle qui le guidera parmi les dangers de la guerre.

Karl traverse les heures sombres de la guerre qui le mèneront si loin de ses chers Tilleuls de Berlin.”

Quelle déception !

J'attendais, comme le promet la quatrième de couverture “un roman foisonnant, une fresque artistico-historique...”, malheureusement, c'est une lecture très décevante. Certes, c'est foisonnant mais pas du tout passionnant.

Quelques passages sont très intéressants, mais l'ensemble trop décousu semble suivre de multiples pistes désordonnées.Cela laisse un triste goût d'ennui.

L'auteur a choisi de laisser la parole à son héros. Le “je” de ce Karl Schuster rend le récit un peu lourd, d'autant qu'il multiplie les digressions, retardant toujours le moment où il est censé nous apprendre quelque chose de “grave”.

Au final, les révélations trop attendus se révèlent bien souvent décevantes.

Le principe de narration force également Karl Schuster a toujours être mêlé, de près ou de loin, à tous les grands événements. N'étant pas très bien ficelé, le récit perd beaucoup en crédibilité.

Jean Octeau ne semble pas être parvenu à faire des choix entre l'art, l'amour, la politique, la Résistance (à petite et grande échelle), la psychanalyse dans laquelle on se noie carrément dans la dernière partie... On peine à s'y retrouver et à s'attacher à qui que ce soit dans la centaine de personnages qu'on croise dans les pages de ce roman.

Les moments les plus intéressants sont liés à l'art et au voyage.

On assiste, éberlué, à la classification des œuvres avec la terrible notion “d'art dégénéré”.

Les considérations sur le monde de l'art sont très instructives et parfois même passionnantes.

De même on suit avec plaisir le héros dans les rue de Berlin de Kreutzberg à Savigny Platz puis à travers l'Europe.

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Histoire d'un Allemand de l'Est de Maxim Léo,

Actes Sud, 2010

 

“Maxim Léo, journaliste berlinois, avait 20 ans au moment de la chute du mur. Il raconte dans ces pages l'histoire d'une famille peu commune... la sienne.”

 

Un excellent récit !

Maxim Léo est journaliste et en suivant le fil de l'histoire de sa famille et ses secrets, il brosse littéralement un tableau de l'histoire de l'Allemagne de la montée du nazisme à la chute du mur de Berlin.

À chaque génération, est lié un moment crucial de l'histoire tourmentée du pays.

Au sein de chacune d'elles, les courants de pensée les plus contradictoires sont présents. Un grand-père résistant, un autre dans l'armée allemande durant la Seconde Guerre mondiale, et pourtant tous les deux défenseurs du mur.

Une mère qui a cru, avec ferveur, en l'avenir de la RDA, un père qui rêvait à la chute du mur dès le lendemain de sa construction. Les deux ne vivent pas si bien la chute du mur.

Certes celle-ci symbolisera la liberté mais, pour certains également, l'anéantissement d'idéaux qui fondent une vie.

 

Maxim Léo est un narrateur de talent. En mêlant habilement histoire personnelle et grande Histoire, il nous permet de mieux comprendre pourquoi certains ont ardemment voulu un mur mais aussi comment ce rêve est devenu un cauchemar.

Comme il le dit très bien en parlant de ses deux grands-pères : “ ils n'ont jamais pu voir le grand mensonge qui était ce grand rêve parce que leurs propres mensonges existentiels auraient alors été révélés.”

Il aura fallu trois générations pour que ce rêve naisse, puis meure :” la RDA est restée le pays des anciens, des pères fondateurs, et sa logique n'avait plus de sens pour personne”.

 

Histoire d'un Allemand de l'Est est à la fois un récit instructif et passionnant !

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Rien où poser sa tête de Françoise Frenkel,

Gallimard, 2015

 

 

“En 1921, Françoise Frenkel fonde la première librairie française de Berlin. Contrainte en 1939 de fuir l'Allemagne, elle gagne la France où elle espère trouver un refuge. C'est une vie de fugitive qui l'attend jusqu'à ce qu'elle réussisse à passer clandestinement la frontière suisse en 1943...”

 

“Rien où poser sa tête” a été publié en septembre 1945 en Suisse. En 2010, un exemplaire du livre est retrouvé à Nice dans un vide-grenier. Il est alors réédité en 2015.

 

C'est un magnifique témoignage qui illustre la terrible vie des persécutés.

Seul le début se déroule à Berlin, et c'est à ce titre qu'il figure dans cette escapade mais pas que...

Ce beau texte ne doit plus risquer de tomber à nouveau dans l'oubli.

 

Françoise Frenkel est née en Pologne et a fait ses études en France. Les premières pages expliquent très bien la naissance de sa vocation de libraire.

Installer une librairie française à Berlin, dans les années 20, est un sacré défi.

Malgré les rancunes qui suivent la Première Guerre mondiale, le désir de culture fera le succès de la librairie et l'auteur connaîtra des années de bonheur.

La montée du nazisme sonnera la fin de cette belle aventure littéraire mais surtout jettera l'auteur dans la tourmente. Elle vivra, au plus près, le boycott des magasins tenus par des Juifs, le barbouillage odieux des vitrines, l'incendie de la synagogue...

 

En 1939, Françoise Frenkel fuit l'Allemagne et s'ouvre pour elle, une vie de fugitive : se cacher, fuir, éviter à tous prix la déportation... le chemin sera long : Paris, Avignon, Nice, Annecy et périlleux, fait de belles rencontres mais aussi de dénonciations, d'incarcérations..

 

Le récit s'achève en 1943, à l'exact instant où Françoise Frenkel passe clandestinement la frontière suisse, on ne saura rien du reste de sa vie.

De même, curieusement l'auteur ne fait absolument jamais mention de son mari avec qui elle a pourtant tenu la librairie. Celui-ci a quitté Berlin avant elle, arrêté lors d'une rafle à Paris en juillet 42, il est mort à Auschwitz.

 

Dans sa préface, Patrick Modiano explique avec justesse pourquoi il préfère “ne pas connaître le visage de Françoise Frenkel...”

Il est vrai que dans un sens cela donne la force du texte.

Cependant, on s'attache tellement à cette femme qu'on aimerait poursuivre avec elle sa vie et savoir ce qu'elle est devenue ainsi que sa mère à qui elle pense tant et qui est restée en Pologne.

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Anges de Berlin de Sylvie Deshors,

Rouergue, 2007

 

“Normalement, ce sont les filles qui se tirent sans prévenir, pas les mères. Mais lorsque Mary disparaît lors d'un concert à Berlin, sa fille, Solti, ne pouvait pas imaginer que ce week-end prendrait la tournure d'une course-poursuite et d'une enquête sur le passé.”

 

Prix Polar Jeunesse du Salon Polar and Co de Cognac en 2007.

 

Ce livre ne m'a pas plu mais ce n'est ni étonnant, ni grave, dans la mesure où il ne s'adresse pas à moi. Acheté par erreur je l'ai quand même lu bien que l'âge de mon adolescence soit largement révolu.

Si je me place du point de vue d'un jeune lecteur, les seuls points d'intérêt de ce roman ; la ville, les affrontements extrême gauche/néonazi, les hakers, sont réels mais bien minces par rapport à la médiocrité de l'ensemble.

 

Il est question ici du passé de Berlin. La jeune Solti va découvrir le passé de sa mère. Celle-ci a appartenu à un groupe militant anarchiste, ce qui donne l'occasion d'évoquer les tensions politiques berlinoises très particulières avec la résurgence des groupuscules néo-nazis.

 

Malheureusement, si l'idée du départ est assez prometteuse, la suite ne tient pas ses promesses. On se retrouve plongé dans un méli-mélo où les malversations financières prennent largement le dessus sur les idées politiques.

Pour retrouver sa mère, notre jeune héroïne a bien de la chance... elle trouve très (pour ne pas dire trop) rapidement un réseau d'aide hyper dévoué.

On entre alors dans l'univers des punks “anarchos hackers”. Le personnage de Nof est bien sympathique : vieux punk bourru au grand cœur. Par chance, il est également un pro de l'informatique. Dans ce domaine on ne comprend vraiment pas ce qu'il fait... mais a priori c'est efficace !

Dans le domaine de l'exploration des relations mère-fille, le début est plutôt pas mal.

Solti, durant ce séjour à Berlin, prend petit à petit conscience, d'une part de son attachement à sa mère, mais aussi de son existence en dehors d'elle.

 

Les phrases courtes choisies pour la narration soulignent bien la peur de la jeune fille seule dans une ville inconnue, dont elle ne connait pas la langue.

 

Il me semble que pour apprécier ce roman de bout en bout il ne faut pas se contenter d'être jeune, il faut aussi être bien peu exigeant.

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Terminus Berlin de Edgar Hilsenrath,

Le Tripode, 2019

 

“Edgar Hilsenrath raconte avec dérision le destin d'un alter ego littéraire, qui près de 30 ans après avoir quitté l'Europe et ses fantômes, retrouve son pays natal.

Mais Lesche, traumatisé par son expérience du ghetto, peine à trouver sa place dans un Berlin marqué par le consumérisme et la chute du mur.”

 

Edgar Hilsenrath, écrivain de la Shoah et de l'exil, n'a été publié en Allemagne qu'une fois que ses livres soient devenus des best-sellers aux États-Unis.

Longtemps, les éditeurs allemands ont craint la réaction du public face à l'approche très crue de l'auteur sur la Shoah.

Il est vrai que l'écriture de Edgar Hilsenrath tranche complètement avec l'image que l'on a habituellement des romans qui traitent de cette période. Le sexe est très largement présent et on sent, l'auteur vieillissant très tourné vers le sien.

En plus de livrer un passé tragique, et on mesure à quel point il est littéralement impossible d'en sortir, l'auteur fait une critique acerbe de l'Allemagne d'aujourd'hui. La page est impossible à tourner.

Malgré la fin de la guerre, le mur et sa chute... il semble à l'auteur qu'il n'y a décidément qu'en Allemagne qu'on sent plus qu'ailleurs, qu'on est juif.

D'une part parce que les groupuscules néonazis ont toujours les mêmes odieuses et violentes manières de vous le signifier. D'autre part, les “autres” en font toujours trop pour camoufler leur mauvaise conscience.

 

Lesche, écrivain sans le sou, libidineux et coureur de jupons est retourné en Allemagne par amour et besoin de la langue. Pourtant on l'avait prévenu : “c'est une mauvaise blague. Pourquoi les Allemands auraient-ils besoin d'un mémorial ? Le pays tout entier est un monument à l'Holocauste.”

 

Ce roman est très particulier, à la fois farfelu et grave, tendre et piquant.

Un film...

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“Good Bye Lenin” de Wolfgang Becker

avec Daniel Brüh, Katrin Sass ,Chulpan Khamatov,

1h58, comédie dramatique, Allemagne, 2003.

 

“Alex, un jeune berlinois de l'Est vit la chute du mur alors que sa mère est dans le coma, à la suite d'un infarctus.

Celle-ci a toujours été une active militante. Les mois passent, le coma perdure, la ville se transforme.

Au bout de 8 mois, elle ouvre les yeux. Alex veut absolument lui éviter un choc brutal que son cœur affaibli ne pourrait supporter…”

 

Un film vraiment très sympa. “Good Bye Lenin” mèle habilement un bel exemple d'amour filial avec le témoignage percutant du choc provoqué par la chute du mur.

 

En quelques mois l'Allemagne de l'Est ne ressemble plus à ce qu'elle a été durant des décennies. Les bouteilles de coca envahissent les rayons, les fast-foods poussent comme des champignons, les intérieurs se modernisent et s'uniformisent à la mode Ikea.

 

Il est très drôle de voir Alex se démener pour recréer l'ancien monde de sa mère. Il lui faudra parcourir des kilomètres pour trouver la marque de ses cornichons préférée. Il devra payer des enfants pour revêtir l'ancienne tenue des pionniers et se transformer en petits choristes…

Alex va être complètement dépassé par ses mensonges.

L'humour laisse petit à petit place à l'émotion. Il est attendrissant ce jeune homme qui protège sa mère.

 

La chute du mur a, bien sûr, amené la Liberté à l'Est mais Wolfgang Becker ne tait pas les déconvenues.

En plus du Coca-Cola, le chômage s'est aussi invité sur les ruines du mur. Des jeunes ont troqué des études de droit pour un emploi au Burger King...

 

“Good Bye Lenin”, à la fois plein d'humour et de sensibilité, offre un moment très plaisant.

Une pièce...

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Mise en scène, Stéphanie Fagadau avec Michel Jonasz, Hugo Becker, Josiane Stoléru, Pierre Bénézit, Amélie Manet, Jean-Baptiste Marcenac.

Comédie des Champs-Élysées, 15 avenue Montaigne, 75008

jusqu'au 4 mai 2019

 

“Le cas Eduard Einstein, pièce adaptée du best-seller de Laurent Seksik, raconte l'histoire véritable du fils “fou” d'Einstein, Éduard, atteint de schizophrénie

Sur fond de trame historique puissante, de l'Allemagne des années 30 jusqu'à l'Amérique de McCarthy, la pièce révèle à travers la destinée du père en exil et du fils à l'asile, la facette la plus méconnue de l'homme le plus célèbre de son temps. Le bouleversant drame personnel du génie universel.”

 

Un excellent livre, une très bonne pièce...

La mise en scène est particulièrement réussie. La scène est partagée en deux. On passe donc, avec fluidité, de l'hôpital psychiatrique dans lequel réside Éduard au bureau de son père à Berlin puis en Amérique.

Les acteurs sont très bons. Hugo Becker est remarquable. Jouer la folie est souvent hasardeux, difficile de ne pas trop marquer le trait ou de produire un rendu peu naturel. Ici ce n'est pas le cas, le jeu est juste... On y croit et on est ému de voir ce jeune homme à qui un avenir brillant souriait, s'enliser dans ses hallucinations et ses peurs irrationnelles.

De ce côté de la scène, on est dans la sphère privée. Éduard souffre mais sa maladie est doublée de la difficulté d'être un inconnu qui porte un illustre nom.

En fond, se dessine une histoire de la psychiatrie. Le traitement du patient est celui de son époque, c'est-à-dire de choc !

 

Avec le père, on est plongé dans la grande Histoire.

Le contraste est douloureux, Albert Einstein prend des positions humanistes sur l'état du monde mais peine à s'intéresser à son fils qu'il ne peut pas comprendre. Il ne le reverra jamais après son départ en 1933 pour l'Amérique.

On traverse les continents mais également le temps ainsi que différents événements. L'Allemagne des années 30, la guerre, la découverte des camps de concentration... ce sont ces maux qui poussent Einstein vers l'Amérique, qui n'est pas accueilli sans arrière pensées , mais si il est reconnaissant de ce geste, il est sans complaisance vis-à-vis du régime et de la surveillance exercée sur lui.

La pièce navigue habilement entre les domaines et sentiments privés et publics.

Un très bon moment de théâtre.

... pourquoi pas ?

... vraiment pas mal

... à ne pas manquer

... à fuir !

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