Albin  Michel, 2023

« Étienne est correcteur dans l'édition. Avec sa femme, Vive, délicieusement fantasque, ils forment depuis dix ans un couple solide et amoureux. Mais quelque chose va faire dérailler cette parfaite partition. Ce sera aussi infime que l'épaisseur d'un cheveu, aussi violent qu'un cyclone qui ravage tout sur son passage.

Il était alors impossible d'imaginer que trois jours plus tard, dans la nuit de jeudi à vendredi, Étienne tuerait sa femme. »

Dès, le départ, le lecteur est prévenu,  Étienne va tuer Vive.

La fin est annoncée et ce que nous allons suivre, c'est la tragique trajectoire qui va mener Étienne à commettre l'horreur.

On sait… et pourtant nous n'avons pas pu nous empêcher d'avoir parfois le sourire à la lecture de certains comportements d'Étienne. Mais ça, ce n'est que durant les premières pages !

Le résumé du roman présente un couple « solide et amoureux. »

Étienne, correcteur littéraire, prend très à cœur son travail et semble vouloir mettre en œuvre un projet plus personnel dont on ne sait rien au début. Vive est photographe. Leur vie est rythmée par les événements culturels :  vernissages réguliers, concerts classiques le mardi soir, les vacances d'été en Italie…

En remettant en cause ces rituels, Vive n'a pas conscience du drame dont elle va être la victime.

Claire Berest nous fait entrer dans la tête d'un homme qui bascule dans la folie. Pour Étienne, chaque manquement de la part de Vive à leur routine, est un manque de respect et un coup de canif à leur contrat amoureux.

Le lecteur découvre petit à petit que le bonheur parfait de ce couple n'est peut-être qu'une image. Le roman interroge sur les possibles déséquilibres dans un couple. Vive est entrée dans les désirs d'Étienne pour lui faire plaisir. Celui-ci n'arrivera pas à admettre que sa femme émette des signes d'émancipation. On a le sentiment que « mine de rien », sans violence manifeste, Étienne exerçait peut-être une forme de dictature.

S'était il demandé qu'elles étaient les désirs profonds et personnels de Vive ? Finalement n'était-il pas le seul à décider de ce qu'ils aimaient, écoutaient…

On découvre également que cette attitude n'est pas exclusivement réservée à sa vie privée. Dans son travail, Étienne fait preuve d'un rigorisme effroyable et son sentiment de supériorité l’amène à nier les autres. Il fait entrer ses propres désirs dans les manuscrits qu'il n’est censé que corriger et non remanier !

Très bien écrit, L'épaisseur d'un cheveu est glaçant. Claire Berest rend compte avec clarté de l'irrationalité et dissèque avec brio le chemin de la folie.

Le lecteur découvre les événements à rebours et si le suspense ne porte pas sur le dénouement, il est très bien entretenu sur la mécanique qui y mène.