Actes Sud, 2020

“Hot Maroc est l'histoire d'un anti-héros, personnage insignifiant, lâche et timoré qui, par le biais des réseaux sociaux règle ses comptes avec ses ennemis intimes, c'est-à-dire toute personne ayant mieux réussi que lui.

Son immense aptitude à nuire, par clavier interposé est découverte et appréciée à sa juste valeur par les services de sécurité.

Et le voilà soudain, contraint d'utiliser ses talents de blogueur pour répandre sur la puissante revue électronique Hot Maroc les rumeurs assassines et les fake news que lui dictent les taupes du gouvernement”

Hot Maroc est un livre sarcastique et grinçant qui dénonce une société gangrenée par le mensonge et les manipulations.

J'ai beaucoup apprécié l'aspect ”chroniques” et sa galerie de personnages mais moins l'aspect roman.

Certes on suit une histoire, celle de Rahhal et par extension celle de son entourage, mais il y a tant de personnages et de digressions qu'on perd un peu le fil de la narration au point de rester sur sa faim, une fois la lecture achevée.

Ce roman est si foisonnant qu'il en devient étourdissant. II faut dire que l'auteur n'épargne aucune catégorie sociale. L'arrivée d'Internet aurait dû être une ouverture sur le monde, elle n'est finalement synonyme que d'une arme dans l'ombre du pouvoir.

Rahhal est lâche, menteur envieux. Il vit sa vie en rêve à travers des fantasmes. S'imaginant parler brillamment en société, tuer ceux qu'il déteste, faire l'amour avec les femmes qu'il désire…

En devenant gérant d'un cyber café, Rahhal va assouvir une partie de ses fantasmes. Non seulement il épie les clients jusqu'à consulter leur boîte Mails mais il se crée aussi une multitude de personnages fictifs pour laisser des commentaires assassins sur des articles ou des profils facebook.

Rahhal donne un nom de bête à tous ceux qui l'entourent.

Si dans cette comédie animale, on l'imagine être le rat, lui se vit plutôt en écureuil. Il n'engrange pas les noisettes mais les informations sur chacun afin d'augmenter sa puissance de nuisance.

On croise donc, la Vache, le Rat-Taupe, le Hérisson, la Mangouste, la Lionne et bien d'autres encore.

Sous ces noms, l'auteur brosse un tableau sans complaisance aucune de toutes les composantes de la société marocaine : des prédicateurs démagogues, des universitaires prétentieux, des journalistes qui n'en n'ont que le nom, des bourgeois affairistes, des petits magouilleurs…

Dans ce dédale, il n'est pas toujours facile de retenir l'attention du lecteur avec un anti-héros.

Cependant il y a vraiment d'excellents passages et l'écriture de Yassin Adnan, pleine d'un humour mordant est très agréable.

J'ai adoré les débats enflammés à propos de la fatwa contre les escargots !

Tout un symbole me semble-t-il des conflits stériles qui n'aident pas à l'avènement de la démocratie.