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Voyage au bout de l'enfance

Benzine Rachid

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Seuil, 2022


« Trois mois. D'après maman, ça fait précisément trois mois aujourd'hui qu'on est enterré dans ce fichu camp. Et ça fait presque quatre ans que j'ai quitté l'école Jacques-Prévert de Sarcelles.

Fabien est un petit garçon heureux, qui aime le football, la poésie et ses copains, jusqu'au jour où ses parents rejoignent la Syrie. »


Rachid Benzine signe là un roman terrible. Le titre même n'est pas anodin. C'est véritablement le voyage au bout de l'enfer d'un enfant. Fabien, élève de CE2, est le narrateur de son parcours forcé qui le mène de son école de Sarcelles jusque dans celle de Daesh. C'est avec les mots d'un poète en herbe et la naïveté d'un enfant insouciant que le lecteur découvre l'horreur. Nous n'en saurons jamais plus que ce que le petit Fabien sait lui-même. Il n'a pas vu venir le départ de sa famille pour la Syrie. Son monde va s'écrouler sans avoir les motivations profondes de ses parents. Tout ce qu'il aimait jusqu'à présent  : son maître d'école, la poésie, ses copains, doit devenir l'ennemi contre son gré.


Dans les rangs de Daech, l'insouciance de l'enfance est réduite à néant. La poésie est remplacée par le visionnage de vidéos de décapitations. Les parties de foot ont laissé la place au maniement des armes.

Fabien, de manière très simple compare le système barbare auquel il est confronté, aux Jeunesses hitlériennes. Si cela lui vaut une gifle, c'est pourtant bien lui qui met le doigt sur ce que les adultes ne sont plus capables de voir et encore moins d'analyser.

 Comme l'a si bien écrit le poète Jacques-Prévert dans un de ses poèmes : «Et la statue m'embrasse mais personne ne nous voit 

                   Sauf un enfant aveugle qui nous montre du doigt. »

Le nom de l'école de Fabien en France n'a sûrement pas été choisi au hasard par le romancier !

Notre jeune narrateur vit un terrible cauchemar éveillé et le lecteur constate avec effroi qu'aucun retour en arrière n'est possible !

Les veuves sont rermariées à tour de bras. Une fois son père (qui se demande ce qu'il est venu faire là) mort au combat, l'enfant voit se succéder les beaux pères inconnus et qui le resteront.

Même une fois la guerre terminée, le camp de prisonniers ne sera pas la fin de l'enfer. À l'intérieur, il faut prendre garde aux furieuses qui se sont érigées en gardiennes de Daech. À l'extérieur, l'enfant et sa mère sont considérés comme des monstres par les populations déplacées par le djihad. Rien ne sera plus ni simple, ni source de joie.

Quels que soient les conflits, les enfants seront toujours des victimes de la folie des adultes.

Ce très court roman est très poignant mais surtout très percutant.

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