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Parcours autour du Père Lachaise

4 avril 2019

Ce petit parcours concentre tout ce qu'on aime chez “Pourvu Qu'on Ait Livre's” : un petit bout de patrimoine historique et une belle présence culturelle dans un milieu où se croisent habitants du quartier et promeneurs.

La place Gambetta, de forme hexagonale de 90 mètres de largeur, date de 1870.

De cette place part l'avenue du Père Lachaise d'où on rejoint le cimetière du même nom en cinq minutes à pied.

Le cimetière le plus visité de Paris mérite qu'on s'y attarde. Il est à la fois une promenade bucolique avec ses 5300 arbres mais aussi une plongée dans l'histoire de la ville de Paris ainsi que des illustres noms qui peuplent les allées.

Sans oublier la part d'histoire de l'art puisque tous les courants architecturaux se croisent ici.

Entre la place et le cimetière, on trouve La Colline, théâtre national fondé en 1988, consacré aux écritures théâtrales contemporaines et modernes (20e et 21e siècles).

Un musée...

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Cimetière du Père-Lachaise

 

Une visite guidée est fortement conseillée. Seul, cela ne reste qu'une sympathique promenade, alors qu'une visite guidée sera le meilleur moyen de ne rien rater et d'apprendre plein de choses.

 

Des visites thématiques sont sûrement préférables selon les goûts de chacun : peintres, romanciers, poètes, chanteurs de variété, art funéraire...

La visite générale qui passe d'Apollinaire à Annie Girardot, d'Oscar Wilde à Michel Delpech est un peu fastidieuse car le cimetière est peuplé de célébrités. La visite dure 3h avec un guide fort sympathique et plein d'humour. Il égrène histoires et anecdotes pour chacun..

 

Le cimetière du Père-Lachaise tient son nom du confesseur du roi Louis XIV.

Avec ses 44 hectares, il est le plus grand cimetière parisien intra-muros.

Ouvert en 1804, il a alors, peu de succès. Les parisiens rechignent à se faire enterrer sur des hauteurs, dans un quartier réputé populaire et pauvre, et qui plus est hors de Paris, à cette époque.

Un an après son ouverture, il n'y a que 44 tombes !

Aujourd'hui il y a 70 000 concessions !

Une pièce...

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Qui a tué mon père,

texte Édouard Louis, mise en scène et jeu, Stanislas Nordey

 

Théâtre National La Colline, 15 rue Malte-Brun, 75020

du 12 mars au 3 avril, puis “sur la route” tout le mois de mai.

 

 

“ Qui a tué mon père est l'histoire d'un retour. Un homme se rend dans l'appartement de son père et découvre un corps délabré, celui d'une certaine classe ouvrière d'une région défavorisée de la France d'aujourd'hui.

Il se remémore alors ses souvenirs d'enfance pour retracer, par le prisme de leur relation, l'histoire de cet homme jusqu'à sa mort sociale. Et dans un volte-face littéraire, le politique rejoint l'intime pour dénoncer ce que la violence sociétale produit sur les corps invisibles”

 

Édouard Louis a tout pour plaire à “Pourvu Qu'on Ait Livre's” : son parcours, sa préoccupation du fait social, son engagement, son goût pour les mots…

Pourtant je n'ai pas été plus convaincue par “Qui a tué mon père” que je ne l'avais été par “En finir avec “Eddy Bellegueule”, son premier livre.

Quand on se lance dans le “roman autobiographique” l'exercice est rapidement périlleux. D'autant plus, lorsqu'on multiplie l'expérience.

Le lecteur, ou ici le spectateur, peut être vite dérouté par les contradictions.

Mieux vaut faire comme Romain Gary avec “La promesse de l'aube” et prévenir le lecteur qu'il a entre les mains une autobiographie romancée et non l'inverse !

 

La pièce est austère, c'est un long monologue. On attend d'être porté par le jeu et le texte mais on ne l'est pas autant qu'on le souhaiterait.

Édouard Louis a voulu raconter l'histoire de la relation à son père tout en l'inscrivant dans un monde politisé. Il s'interroge sur la violence, celle que son père exerce sur sa famille parallèlement à celle qui est exercée sur lui, dans un monde de casse sociale.

Le point de départ est séduisant, le regard porté sur la classe ouvrière plutôt intéressant, mais au final, la pièce est très décevante.

La mise en scène est minimale, certainement pour mettre en relief le texte. Malheureusement, la succession des souvenirs d'Édouard Louis finit par devenir presque ennuyeuse.

Le final, encensé par la critique, est un “J'accuse”. Dans une forme très directe, les noms des responsables qui ont détruit la santé de son père sont lancés au public . Une liste des présidents liés à des réformes calamiteuses pour les travailleurs, est censée mettre en lien direct la politique et la destruction des corps usés par l'usine.

Le problème étant que n'est pas Zola qui veut et qu'à ce jeu d'imitation on peut vite friser le ridicule !

Pour se restaurer...

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Café des banques,

13 avenue du Père Lachaise, 75020

 

Ses seuls avantages sont la terrasse protégée, les quelques mètres qui séparent l'établissement du Théâtre de la Colline et les prix !

Les gastronomes passeront leur chemin.

Le café des banques (qui à mon avis, devrait changer de nom et davantage s'enorgueillir d'être plus proche d'un théâtre que des banques !) est à la fois un lieu d'habitués mais également de passage avec ceux qui attendent leur piece, leur film où la visite du Père Lachaise.

Une librairie...

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Le Comptoir des mots,

239 rue des Pyrénées 75020

 

Cette petite librairie semble ne pas désemplir... c'est rassurant !

Voilà une vraie librairie du quartier avec son comptoir des années 1940, ses coups de cœur et un accueil sympathique.

Tous les genres d'ouvrages ont leur place, du dernier roman à la Pléiade ,des livres de jeunesse à la poésie...

Deux livres...

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Les héros de la frontière

de Dave Eggers, Gallimard, 2018

 

“Josie à 40 ans, elle est dentiste et mère de deux jeunes enfants. Et Josie n'en peut plus. Un ex-mari d'une lamentable lâcheté, des procès de patients rancuniers, des voisins tyranniques, un remord qui la tourmente, c'en est trop ! Alors Josie quitte son travail et la civilisation, loue un camping-car et embarque ses enfants pour un périple en Alaska...”

 

Un livre bavard qui s'enlise dans des descriptions bien faites mais qui au final n'ont que très peu d'intérêt.

Le voyage à travers l'Alaska est avant tout une crise existentielle. Ce point de départ est attrayant, on entre dans un roman de mésaventures dont les questionnements sont symptomatiques de notre époque chaotique.

Josie est une mère débordée qui s'est laissée embarquer dans une vie qu'elle n'a pas désirée. Émancipée jeune, de parents qui ont aussi perdu pied en leur temps, elle épouse la carrière de dentiste sans savoir pourquoi. Elle se marie avec un homme tout en ayant le pressentiment que ce n'est pas le bon. Avec ce Carl, assez irresponsable et souffrant de troubles gastriques, elle fait deux enfants qui verront plus leur père aux toilettes qu'ailleurs ! On comprend assez bien le désir de fuite et le moyen de locomotion choisi. Le camping-car sera l'occasion de changer d'itinéraire selon ses envies mais sera aussi l'objet de scènes cocasses. Eh oui, un vieux camping-car, ça ne roule pas très vite, les toilettes ça se vide et la vaisselle bringuebalante dans les placards... ça fait beaucoup de bruit.

La liberté se conquiert au prix parfois fort : une nature hostile, la solitude des parkings déserts, des rencontres insolites.

 

Malheureusement, le roman perd assez vite son intérêt. On devrait ressentir une forte empathie pour cette Josie. Rapidement, c'est l'agacement qui prend le dessus. Disons, que trop c'est trop, prendre le mauvais chemin, tout en le sachant a un côté pathologique qui lasse le lecteur.

Toutes ses considérations ont donc à chaque fois peu de valeur puisqu'elle passe son temps à changer d'avis, pour finalement revenir à sa première idée qui n'est pas la bonne, que ce soit sur le sens de la vie ou de la route, au sens propre pour éviter les incendies qui ravagent le Grand Nord.

Les descriptions sont interminables et les désagréments trop répétitifs pour accrocher le lecteur de bout en bout.

Josie et ses enfants assisteront à un spectacle de magie. La chute de cet épisode est intéressant mais pour y parvenir, il vous faudra assister par le menu détail à l'ensemble des numéros présentés ! Et il en sera ainsi pour chaque péripéties !

 

L'ensemble du livre est une déception, alors même que dans l'écriture, il y a un énorme potentiel humoristique.

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Un bon rabbin

de Manuel Benguigui, Mercure de France, 2009

 

 

“Chlomo est un rabbin qui veille avec beaucoup d'affection et de miséricorde sur sa petite communauté de fidèles. Lorsqu'il rencontre l'énigmatique Jacob, sa vie prend un tour inédit. Car Jacob est un tueur à gages névrosé, proche de la dépression. Pour lui laisser le temps de se refaire une santé et de trouver son chemin, Chlomo décide de prendre sa place.

Mais les nouvelles activités du rabbin ont des conséquences : il néglige ses fidèles, rate le Shabbat. Dans son entourage, on commence à se poser des questions...”

 

Avec ce troisième roman, Manuel Benguigui confirme son talent d'écrivain atypique. Une fois de plus, ses personnages sont savoureux :  Chlomo le bon rabbin, si bon qu'il devient tueur à gages pour rendre service, Jacob ensuite, fatigué de son métier. Vient ensuite la petite communauté de fidèles de la synagogue. Ces membres (tous d'un âge assez avancé) sont à la fois émouvants et délicieusement ridicules.

Leur propension à croire au démon est très drôle, leurs aventures pour attraper ce dernier sont franchement hilarantes.

Au-delà de l'humour, la question posée par ce roman est philosophique. Les notions de Bien et de Mal sont au cœur du propos. La fin justifie-t-elle les moyens ?

L'inversion potentielle des valeurs est-elle viable à long terme ?

Ces concepts très abstraits sont parfaitement illustrés par les événements qui vont s'enchaîner dans la nouvelle vie de ce “bon rabbin”.

Chlomo rend, dans un premier temps, service mais l'argent (mal) gagné peut-il être dépensé sereinement même si c'est pour le bien de la communauté ?

Pour poser la problématique de façon efficace, Benguigui a eu la riche idée de ne pas donner d'histoire et d'identité aux “éliminés”.

Réduits à l'image de visages qui sont le symbole parfait de ce qui hante les mauvaises consciences Chlomo et Jacob devront vivre avec.

L'écriture est excellente, fine, sérieuse et pleine d'humour à la fois : “il demanda la permission à Dieu, solennellement, arguant de la sincérité de sa démarche. Dieu ne manifesta aucune objection. Il laissa Chlomo décider”

“...La synagogue semblait au bord de tels sommets que le triomphe triomphait du triomphe...”

 

“Un bon rabbin” est à mettre dans la même catégorie que “A serious Man” des frères Cohen (2009), c'est jubilatoire.

Un cinéma...

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MK2 Gambetta, 6 rue Belgrand, 7501

 

Construit en 1920, dans le style Art Nouveau, ce bâtiment de béton en rotonde semi-circulaire était à l'origine, un théâtre.

En 1928, il devient la propriété du groupe Gaumont.

En 1997, le groupe MK2 rachète la salle et rénove la façade, classée aux monuments historiques.

Deux films...

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Le mystère Henri Pick

de Rémi Bezançon avec Fabrice Luchini, Camille Cottin et Alice Isaaz,

1h40, comédie, France

 

“Dans une bibliothèque, au cœur de la Bretagne, une jeune éditrice découvre un manuscrit dans la section des “refusés”.

Elle décide de le publier et le roman devient rapidement un best-seller.

Mais son auteur, Henri Pick, un pizzaiolo breton, mort deux ans plus tôt, n'aurait selon sa veuve, jamais écrit autre chose que ses listes de courses.

Persuadé qu'il s'agit d'une imposture, un célèbre critique littéraire décide de mener l'enquête avec l'aide inattendue de la fille de l'énigmatique Henri Pick.”

 

Ce n'est pas le film du siècle mais on reconnaît volontiers qu'on passe un agréable moment. On ressent exactement la même sensation qu'à la lecture du roman de David Foenkinos dont le film est tiré.

On se laisse porter par des personnages sympathiques, par les coulisses du monde du livre...

 

Le mystère Henri Pick est à la fois une enquête littéraire, une comédie, voire une comédie romantique parfois.

Fabrice Luchini n'en fait jamais trop dans le rôle de Jean-Michel Rouche, le critique littéraire qui ne démord pas de l'idée que Henri Pick ne peut-être l'auteur du roman qu'on lui attribue.

Il est dans un rôle qu'il semble affectionner, le cynique qui s'humanise au contact des autres.

L'idée d'une salle de bibliothèque qui regrouperait les livres refusés par les éditeurs est charmante.

L'invention de ce concept est un bel hommage aux livres mais encore plus à leurs auteurs.

Ainsi tout livre a une chance d'être lu... même ceux aux sujets les plus improbables.

 

Le monde de l'édition est gentiment égratigné. (David Foenkinos réglerait-il quelques comptes ?)

Dans le film, Grasset a tiré le gros lot avec ce mystère Henri Pick, les autres éditeurs enverront des hordes de stagiaires au fin fond de la Bretagne pour consulter les livres refusés cherchant, espérant la perle rare, allant même jusqu'à publier celui qui a été le plus refusé !

 

Le film est assez drôle, les répliques bien senties sont nombreuses.

 

Le mystère Henri Pick est simple et frais mais la question sous-jacente n'est pas simpliste. Qu'est-ce qui fait le succès d'un livre : son contenu ou le buzz autour de son auteur ?

La question se pose assez régulièrement. Romain Gary invente Émile Ajar pour savoir si on le publie pour son nom ou ses qualités littéraires.

Le battage autour de Michel Houellebecq interroge au même titre que l'anonymat de Elena Ferrante, auteur de “L'amie prodigieuse”.

Cela n'enlève rien à la qualité possible de l'oeuvre, mais le foisonnement de la production littéraire de notre époque, mérite qu'on se pose la question.

Le mystère Henri Pick est une chouette enquête littéraire qui se regarde avec plaisir.

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Rebelles de Allan Mauduit

avec Cécile de France, Yolande Moreau, Audrey Lamy,

1h27, comédie, France.

 

“Sans boulot, ni diplôme, Sandra, ex Miss Nord-Pas-de-Calais, revient s'installer chez sa mère à Boulogne-sur-Mer après 15 ans sur la Côte d'Azur.

Embauchée à la conserverie locale, elle repousse vigoureusement les avances de son chef et le tue accidentellement.

Deux autres filles ont été témoins de la scène. Alors qu'elles s'apprêtent à appeler les secours, les trois ouvrières découvrent un sac plein de billets dans le casier du mort...”

 

Le premier quart du film pose le décor. Une ex Miss, Cécile de France, qui après des rêves de grandeur, retourne à la case départ : le bungalow de sa mère, gardienne de camping, les mains manucurées dans du poisson à mettre en boîte.

Une femme célibataire, Audrey Lamy, qui élève son fils d'une drôle de manière et qui achète de la drogue au lieu de faire réparer sa voiture.

Une brave mère de famille, Yolande Moreau, dont le mari au chômage semble peu concerné par l'accumulation des loyers impayés.

Une fois le décor planté, le film enchaîne les situations tambour battant. Il faut dire que, parfois, même si on est pris au dépourvu par une violence assez crue, on a pas le temps de s'ennuyer.

C'est un véritable western féministe. Les femmes prennent le pouvoir et elles n'hésitent pas à jouer du flingue ou du coup de pelle. On est loin du cliché des femmes fragiles qui se sortent des situations délicates par leur charme où la subtilité qui serait étrangère au genre masculin.

De même, la fameuse “solidarité féminine” n'est pas une évidence, comme le reste, elle se construit.

 

L'aspect western est complètement décalé et du coup plutôt drôle. Ça tire dans tous les coins sans jamais atteindre sa cible. Le bar du saloon, décor habituel des règlements de comptes a laissé sa place au canapé d'un intérieur ouvrier de Boulogne-sur-Mer. C'est “le bon la brute et le truand” version moderne.

“Rebelles” est un film déjanté qui inverse les codes, tout en mélangeant les genres.

Ceux qui ne supportent que "la finesse", les dialogues à fleuret moucheté et les amis de la poésie passeront leur chemin.

... pourquoi pas ?

... vraiment pas mal

... à ne pas manquer

... à fuir !

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