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L'horizon a pour elle dénoué sa ceinture

Benhamou Rebecca

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Fayard, 2019


« Lorsque Chana Orloff arrive à Paris à l'été 1910, elle n'a qu'une idée en tête : être libre. Mais qu'est-ce qu'une femme libre, à l'aube du XXe siècle, sinon une femme seule ?


Pour réaliser ses rêves, elle a fui les pogroms de Russie et les champs de Palestine, où sa famille la conjure de revenir.

Âgée de 22 ans, elle est loin d'imaginer que le Tout-Montparnasse va faire d'elle une reine, une sculptrice reconnue dans le monde entier. »


Ce récit biographique rend un bel hommage à une artiste dont on se demande pourquoi elle a bien pu tomber dans l'oubli ! Comment se fait-il que Chana Orloff soit si peu connue du grand public alors qu'elle est de tous les cercles artistiques de son temps.  On ne peut que constater amèrement que l'histoire a fait son tri. Elle n'a gardé pour la postérité que les noms d'hommes.

Chana Orloff a été l'amie intime de Soutine et de Modigliani. C'est elle qui présente à ce dernier, Jeanne Hébuterne.

Elle a épousé un proche de Guillaume Apollinaire, le poète polonais Ary Justman qui mourut de la grippe espagnole en 1919.

Au-delà de tous ces noms célèbres, son nom seul aurait dû rester dans la lumière eu égard à sa carrière artistique et à l'ensemble de son œuvre.


Chana Orloff est arrivée en France comme couturière. Elle va rapidement découvrir que ses mains sont indéniablement faites pour la sculpture.

Rebecca Benhamou nous entraîne dans la naissance d'une passion artistique et dans l'évolution d'une carrière qu'on peut, sans conteste, qualifier de brillante.


En parallèle, on assiste à la métamorphose de Paris et de la société à travers les yeux de l'artiste qui a subi deux guerres.

On découvre le quartier de Montparnasse comme on ne le connaîtra jamais plus. Les artistes, pour beaucoup immigrés et pauvres, établissent leurs ateliers dans les étables. On croise des poules (au sens propre), on se réchauffe d'un café à la Rotonde où le patron ferme facilement les yeux sur l'ardoise de  ceux dont il ne se doute pas qu'ils seront un jour mondialement connus !

Je crains qu'aujourd'hui, les choses aient bien changé dans ce café select !


On vit également l'ambiance étrange de la Première Guerre mondiale qui a vidé Paris de ses hommes.

L'après-guerre est bouillonnant mais avant d'y plonger, Chana Orloff devra surmonter la perte de son aimé et la difficulté d'être seule avec un enfant en bas âge.

Cependant la sculptrice ne renoncera jamais, ni à sa liberté, ni à son art.

La Seconde Guerre mondiale va l'entraîner dans la tourmente. Chana est juive mais naïvement, se croit protégée par la nationalité française et sa Légion d'honneur.


Sa fuite à Genève et sa survie sont le fruit de la chance et du courage, le sien, mais également celui de certains de ses proches.

Le retour dans ce qu'elle appelle son « travailloir », Villa Seurat, dans le 14e arrondissement, marquera à tout jamais la fin d'une époque dans la vie de la sculptrice.

Chana Orloff aurait pu quitter définitivement la France après la découverte des inscriptions haineuses sur les murs de son atelier, ses sculptures brisées, ses meubles volés...

Elle préférera rester dans le pays qui l'a vu naître artiste, mais sans plus aucune illusion sur le cœur des Hommes.


Ce livre m'a passionnée. Rebecca Benhamou mêle habilement le destin d'une femme, d'une artiste et les évolutions du monde, conséquences de l'histoire.

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